Site de Saint-Gestin – Historique

Source Le Trégor Magazine N° 1 du 6 Janvier 1979

 

Vieilles pierres et histoires de Plestin

L’année 1978 vient de se terminer à Plestin les Grèves avec une découverte et une initiative d’un  plestinais M. Jean Brigant. Découverte et initiative qui intéresseront beaucoup les plestinais et les trégorrois amoureux des vieilles pierres et de l’histoire de leur pays.

Une des « vieilles pierres » de l’histoire de Plestin ?

On sait que Plestin est l’une des rares paroisses de Bretagne possédant deux « saints patrons » : Saint Gestin et Saint Efflam.

Saint Gestin a donné son nom à Plestin ou « Plou » – paroisse de Gestin – devenue ensuite à travers des siècles remplis d’histoires et de légendes « Plégestin » puis commune de Plestin les Grèves. Il faut bien reconnaître que Saint Gestin, moine « gallo-romain » (originaire du pays de Plestin) ( ?) a souvent été négligé ou oublié par les plestinais.

Les plestinais ont beaucoup plus fêté et vénéré, depuis l’arrivée des bretons en Armorique, les migrants (irlandais ?), Efflam qui a donné son nom à un des villages de Plestin et un des plus beaux paysages de Bretagne.

La découverte de M. Jean Brigant va-t-elle sortir de l’ombre la silhouette et l’image peu familière de Saint Gestin ?

En effet, dans la matinée du 30 décembre dernier, avec l’aide de M. Pierrre-Marie Riou, M. Jean Brigant a découvert tout près de sa ferme de Pen ar Vern, située sur un des coteaux de Lanscolva à moins d’un kilomètre du centre et de l’église de Plestin une pierre étrange aux dimensions respectables (longueur 70 cm x largeur 13 cm). Cette pierre représente à l’une de ses extrémités la face d’un homme se tenant la tête entre les mains. Cette pierre que nos lecteurs pourront découvrir sur nos clichés risque d’être en effet très précieuse pour l’histoire de Plestin.

En compagnie de M. Désiré Lucas, Président du Centre Culturel Plestinais qui prépare un ouvrage consacré essentiellement au pays de Plestin, nous avons examiné sous tous ses angles, cette belle pierre de granit. Son motif et sa structure laissent penser qu’il s’agit d’une pierre  placée aux angles d’un chevet ou aux extrémités d’un bâtiment religieux.  L’emplacement de la trouvaille, un tas de pierres et cailloux à moins de 100 mètres des ruines de la chapelle Saint Gestin permet d’avancer l’hypothèse que cette pierre taillée est la seule sculpture actuellement connue, provenant très vraisemblablement de la chapelle du Saint « fondateur » de Plestin.

Bénite au temps des « Bonnets Rouges »…

On se souvient qu’en 1675, de nombreux bretons des villes et des campagnes se révoltèrent contre Louis XIV qui avait décidé de la création de lourds impôts nouveaux en Bretagne (impôt sur le tabac, la vaisselle d’étain, le « papier timbré »…) contrairement aux engagements pris par la royauté française en 1632 par « l’acte d’union » de Vannes. La répression de cette révolte des « Bonnets Rouges » fut féroce et à Plestin, les deux frères Garion en furent victimes. Grâce aux travaux de M. Pérès et Désiré Lucas, historiens de Plestin, nous savons que la chapelle Saint Gestin dont il ne reste en 1979 que ruines fut construite (ou reconstruite ?) en 1673, deux ans juste avant la révolte des paysans de Bretagne « les Bonnets rouges ».

Nous savons aussi que selon le curé de Plestin l’Abbé Boissy en cette même année 1675 « …les paysans pensaient que tout était permis, que les biens étaient communs, et ils n’épargnaient même pas les serviteurs de l’église… ». Citations page 108 – Tome III – Histoire de Bretagne et des Pays Celtiques – Edition Skol Vreiz.

Aussi, ne sera-t-on pas étonné d’apprendre qu’en 1678, alors que des clochers du Pays Bigouden avaient été décapités pour humilier les paroissiens révoltés par la misère et l’injustice et subissaient la sauvage répression des dragons du roi et du Duc de Chaulnes, gouverneur de Bretagne, dans le Trégor à Plestin, le Révérent Père Maunoir présidait à la bénédiction par l’Abbé Boissy de la chapelle Saint Gestin. Les Frères Garion, les deux « bonnets rouges » de Plestin, qui ne furent pas graciés savaient combien le Père Maunoir multiplierait son zèle « … pour que le culte du Roi et de Dieu se confondent » dans leur paroisse.

En 1678, la « mission » du Père Maunoir à Plestin dura un mois et la bénédiction de la chapelle Saint Gestin en fut certainement un des moments les plus marquants. Aussi est-il important de savoir sauvegarder en 1979 les « vieilles pierres » qui racontent ou témoignent de l’histoire de Plestin et du Trégor.

Une excellente initiative   

En découvrant et protégeant dans sa ferme de Pen Ar Vern la seule pierre sculptée provenant de la chapelle Saint Gestin en faisant appel à des personnes compétentes pour son étude, M. Jean Brigant a eu une excellente initiative.

Les plestinais et les lecteurs du « Trégor » seront également heureux d’apprendre que M. Brigant a déjà aujourd’hui sur la parcelle de terre qui lui appartient, dégagé de toutes les broussailles qui les encombraient et les dissimulaient aux yeux des promeneurs et curieux, les ruines de la chapelle Saint Gestin et de la fontaine Saint Gestin.

Beaucoup de plestinais pensent que la fontaine Saint Gestin a disparu ! M. Jean Brigant nous a montré le site de la fontaine qu’il a libéré de toutes ses broussailles puis les pierres éparses qui composaient la base de la voûte de la fontaine Saint Gestin. Il nous a fait découvrir … des dalles en schiste du pays où combien de générations de plestinais ont invoqué Saint Gestin en s’aspergeant de l’eau pure de sa fontaine !

Excellent maçon, M. Brigant se propose, avec l’aide d’amis et de bénévoles, de restaurer totalement la fontaine Saint Gestin. La section Histoire et Archéologie du Centre Culturel de Plestin et la Section Locale du Trégor, se sont engagés à l’aider à réaliser ce projet qui intéressera certainement la municipalité et tous les plestinais qui sont attachés à conserver et mettre en valeur leurs pierres et leurs paysages.

Ces pierres et ces paysages sont des richesses que nous ont transmises nos ancêtres, des richesses pour notre pays et notre histoire d’hier et de demain.

Jean Boutouiller.

Création et entretien de sentiers pédestres